Les végétaux caractérisent ma recherche depuis plus de 30 ans. Dans ce corpus, je revisite le motif floral dans le textile, avec la robe comme thème support. Je voulais aussi rendre un hommage révérencieux à des femmes scientifiques : botanistes et naturalistes qui m’ont inspirée dans mon travail et que j’appelle affectueusement, des femmes racines.
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Originaires de Chine au 7e siècle, les imprimés floraux ont traversé toutes les époques et inspirent toujours les créateurs. De mon côté, cherchant depuis longtemps à mettre en symbiose le corps humain et le monde végétal qui m’entoure, j’ai trouvé la réponse tout près de moi, dans l’idée du vêtement; cette deuxième peau que l’on porte chaque jour. En intégrant la fleur sur le tissu de la robe, je lui apportais une nouvelle matérialité et j’évoquais le corps qui s’y glisse, y bouge et incarne la plante.
Dans mes derniers travaux en imagerie numérique, j’explore la « structure numérique » de mes photographies de plantes au numériseur. De ce procédé, je fais apparaitre mes propres motifs, des motifs cachés, marqués par des textures et des géométries répétitives. Procédant par photomontage, telle une couturière, je coupe, assemble et travaille cette matière graphique et je la jumelle aux portraits plus réalistes des fleurs, pour créer ces robes-tableaux. Tels des florilèges elles deviennent la terre où s’épanouit le motif, le vase où éclate la folie d’un jardin, l’étendard ou s’affiche le féminin ou encore le souvenir d’un temps lointain.
La fleur, organe sexuel de la plante est un attracteur cosmique. Au lieu d’aller vers le monde, elle attire le monde vers elle.1 À l’opposé, nous, habillés de la robe à fleurs, nous allons vers le monde, mais usant nous aussi de notre pouvoir attractif pour générer la rencontre avec l’autre. Ici, le vêtement et les textes s’y associant, sont des véhicules poétiques de mon rapport au vivant, aux végétaux et à l’humain.
Fernande Forest, octobre 2022
1 : Emanuele Coccia, La vie des plantes, p. 127
Remerciements :
Je remercie le centre d’artistes Caravansérail de Rimouski et le Centre Sagamie d’Alma pour leur soutien à la création et à la diffusion.
Détail de L'allée Grand-Métis, 2022
Exposition au centre d'artistes Caravansérail de Rimouski, automne 2022.
S’enrober d’un jardin embrasse la joie du quotidien et rend aussi un hommage révérencieux à des femmes botanistes, naturalistes, scientifiques et même couturière.
La robe « Marcher la flore indigène », 2022
La tanaisie explose de ma poitrine
et le cosmos cache mon sein
dessous les roses bleus se fondent
aux délicates fleurs de l’achillée mille feuilles
Qui donc court à ce point
que l’osmose se produit?
FF
La robe « Marcher la flore indigène », 2022
Impression à encres pigmentaires
sur coton et organza
Révérence à Gisèle Lamoureux, 1942/2018, Québécoise. Botaniste-écologiste,
fondatrice de Fleurbec et plus encore.
La robe « Danser toute la nuit vers l’aube rose », 2022
Impression encres pigmentaires sur organza et georgette
L’une dessine des fleurs et le cycle de vie des papillons, l’autre perce les secrets de la morphologie des plantes
Camouflées dans le paysage vallonneux
d’une robe couleur peau, je les fais dentelle, pixels et raffinement
Depuis tout ce temps,
Ces femmes racines,
s’éveillaient au matin,
enfilaient la robe du jour,
grand ou ordinaire,
et le soir, certaines
la laissaient tomber par terre…
FF
Révérence à Anna Maria Sybella Merian, 1647/1717 (à droite), naturaliste et artiste peintre, Allemande et à Agnes Robertson Arber, 1879/1960, botaniste et historienne des sciences, Britannique
Dans mon corps a fleuri un rêve
Au-dehors, ma robe était vierge
Cette idée devint maîtresse
Rejoindre l’élan qui me traversait
rejoindre les fleurs qui s’épanouissaient en moi
Faire surgir la robe-tableau
le poème floral
le vêtement intemporel
le mariage végétal.
FF
S'enrober d'un jardin (sélection), 2022
Projection, mannequin, draps de coton
fernande forest
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